Revue européenne du 27 octobre 2020
Turquie, Obligations sociales SURE, Digital Service Act... — What's up EU!
Bonjour et bienvenue dans la Revue européenne. Nous éditons le mardi (et le vendredi quand l’agenda des institutions est chargé) une newsletter documentée et lisible pour vous informer sur l’actualité européenne de la semaine.
DIGITAL SERVICES ACT — Après l’assassinat de Samuel Paty, la France fait pression sur l'UE pour qu'elle durcisse les règles à venir concernant les réseaux sociaux. Dans un article publié sur Medium, le secrétaire d’État chargé du numérique, Cédric O, a poussé pour que des éléments de (feu) la loi Avia — elle avait été jugée contraire à la Constitution — soient exhumés et intégrés dans le Digital Services Act, un ensemble législatif qui devrait voir le jour d’ici fin 2020. Parmi ces éléments, Paris souhaite imposer une “obligation de moyens aux plateformes” de “mettre en place des dispositifs de modération”, sous peine de sanctions sévères de la part d’une autorité de régulation.
OBLIGATIONS SOCIALES — “A new gorilla in the bond market” dixit le New York Times, qui commente l’émission obligataire de l’UE. Dans le cadre du fonds de soutien à l’emploi SURE, l’UE a levé 17 milliards d’euros en obligations à 10 et 20 ans, première émission dans le cadre d’un programme de 100 milliards, sous forme d’obligations sociales, pour soutenir 17 États membres dans la réaction à la pandémie de Covid-19. La Commission a déjà proposé l'octroi d'un soutien financier au titre de SURE pour un total de 87,8 milliards d’euros.
À l’issue de ces émissions, l’UE devrait devenir le cinquième acteur obligataire en Europe, derrière l’Italie, la France, l’Espagne ou l’Allemagne. Le commissaire européen au Budget et à l’Administration, Johannes Hahn a souligné le succès de l’opération, avec une demande 13 fois supérieure à l’offre. À -0,26 % , les obligations émises par l’UE ont un taux d’intérêt plus intéressant pour les investisseurs que les obligations des pays les plus sûrs de l’UE (-0,62 % pour l’obligation allemande à 10 ans).
L’épidémie de Covid-19 a permis un véritable changement de mentalité quant à l’émission de dette commune. Traditionnellement, les pays tels que l’Allemagne ou les Pays-Bas refusaient que des obligations européennes communes servent à financer les déficits de pays à la notation de crédit plus faible, comme le Portugal ou l’Italie. Avant de pouvoir financer les programmes du prochain budget européen, l’impasse politique quant aux conditions posées en matière de droits de l’homme par le Parlement européen doit être résolue.
Les banques centrales ont été parmi les souscripteurs les plus importants de cette émission, témoignage de la confiance actuelle en l’euro. Les T-Bills émis par le Trésor américain demeurent l’étalon de référence des obligations à faible risque, représentant environ 27 000 milliards d’euro en valeur de marché
IA — Nous y sommes, l’Union européenne est en train de préparer les premiers éléments de régulation des systèmes d’ “intelligence artificielle” (IA). Dans son livre blanc, la Commission définit l’IA comme le système qui associe des technologies qui combinent données, algorithmes et puissance de calcul. D’après les études menées par la Commission, ces technologies représenteraient à l’avenir près de 60 millions d’emplois au sein de la zone euro d’ici 2025.
Le nouveau cadre prévu par le Parlement vise notamment à mettre en œuvre des garanties contre les préjugés et la discrimination induits par l’utilisation des données agrégées et des algorithmes, préserver le respect de la vie privée et la protection des données
Les eurodéputés planchent aussi sur les utilisations civiles et militaires de l’IA, l’application des systèmes d’IA aux domaines de l’éducation, de la culture et de l’audiovisuel et son utilisation en droit pénal.
TURQUIE — Depuis les déclarations du chef d’État turc Recep Tayyip Erdogan à l’encontre d’Emmanuel Macron et les appels au boycott des produits français, de nombreuses personnalités européennes se sont exprimées sur Twitter en soutien à Paris pour défendre l’ “European Way of Life” (c’est la formule du commissaire européen grec Margaritis Schinas). Parmi ces personnalités, on compte Josep Borrell, chef de la diplomatie européenne, la présidente de la Commission Ursula von der Leyen, Angela Merkel, Mark Rutte, premier ministre néerlandais, Guiseppe Conte, premier ministre italien, Boyko Borissov, premier ministre bulgare, le groupe parlementaire Renew…
BREXIT 🇬🇧 — La City laissée pour compte ? Ce lundi, l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA en anglais) a assoupli ses lignes directrices antérieures qui prévoyaient que le trading d’actions européennes devrait être effectué depuis le continent, à partir de janvier 2021. Désormais, l’ESMA considère que ces titres pourront être échangés sur des plateformes basées à Londres si elles sont libellées en livres sterling.
La Corporation de la City de Londres considère que les services financiers sont les grands oubliés des négociations entre l’UE et le Royaume-Uni. En l’état actuel des négociations, l’accord conclu entre le Royaume-Uni et le Japon, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2021 accordera un accès plus large aux services financiers pour le Royaume-Uni à Tokyo qu’au sein de l’UE.
Alors que David Frost et Michel Barnier ont repris leurs discussions à Londres jusque dimanche 25 octobre avant de continuer à Bruxelles, certains s’étonnent que les pêcheurs comptent plus que les traders. Pour le Royaume-Uni, les services financiers représentent 10 % des recettes fiscales, soit environ 75 milliards de livres et un excédent de 44 milliards de livres pour la balance commerciale.
Le régime d’équivalence est au cœur de la négociation en matière de services financiers. Il permet aux services financiers de pays tiers (assurances, banques, fonds de pension, etc) d’avoir directement accès au marché européen, la Commission disposant d’un droit discrétionnaire de retirer cette équivalence à ces prestataires de services au cas par cas. Le Royaume-Uni a très vite fait montre d’une grande ouverture aux sociétés européennes en matière d’équivalences. Cependant, à ce jour, la seule équivalence donnée par l’UE concerne l’accès aux chambres de compensation (clearing houses) situées au Royaume-Uni pour les clients européens jusqu’en 2022. Cela constitue un bien maigre bilan pour le Royaume Uni qui escompte depuis 2016 une plus grande ouverture côté européen.
RÉFORME DE L’HEURE D’HIVER ? ❄️ — En 2018, la Commission européenne a proposé la fin du changement d’heure biannuel pour 2019. Mais, vous l’aurez constaté, la nuit de samedi à dimanche a bien été prolongée d’une heure. L’UE n’a pas de compétence pour imposer l’heure à toute l’Union, et peu de mouvements sont visibles du côté des États membres. La consultation de 2,1 millions de Français en 2019 a révélé que 59 % sont en faveur du maintien à l’heure d’été. Les Belges sont plus divisés, avec 50 % en faveur de l’heure d’hiver et 45 % en faveur de l’heure d’été…
BONUS+ 🇺🇸 — Vous connaissez QAnon ? C’est une mouvance politique pro-Trump et conspirationniste qui regroupent les gourous anonymes du Pizzagate ou de la théorie selon laquelle Kim Jong-un serait un pantin de la CIA. Le Monde a fait une enquête sur cette bombe de fakes news selon laquelle les États-Unis seraient dirigées secrètement par des agents du « deep state », pédophiles ou satanistes.
À l’approche des élections présidentielles aux États-Unis, Facebook a banni en catastrophe toutes les publications en lien avec QAnon début octobre. Quant au forum 8kun, sur lequel était hébergée une grande partie des publications de l’anonyme “Q”, il avait été mis hors ligne la dimanche soir … mais il est à nouveau en ligne depuis hier, lundi grâce à des hackers russes 👀.
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