Revue européenne | 6 juillet 2021
Présidence slovène • passeport sanitaire • football • dette & bonds • Chine • taxe • Brexit
Bonjour et bienvenue dans la Revue européenne du mardi, un condensé d'actualité européenne utile. Bonne lecture !
À LA UNE • tonitruante Slovénie
L’arrivée sur la scène politique européenne du premier ministre slovène Janez Janša pour la présidence tournante slovène du Conseil de l’Union est sous haute tension.
À l’occasion de la présidence slovène, Janez Janša veut notamment renforcer l’état de droit “en respectant les traditions”. 62 ans, qui, au meilleur de sa forme tweet jusqu’à 200 fois par jour, ancien anarchiste, ancien communiste, puis héros de l’indépendance slovène, et enfin ministre de la défense en 1990, Janez Janša est aujourd’hui premier ministre pour la troisième fois depuis 2004.
Le “Maréchal Twitto”, comme il est surnommé chez lui, est maintenant ultra-conservateur et le meilleur soutien de son homologue hongrois, Viktor Orban.
CERTIFICAT VERT • le “rêve européen”
Depuis le 1er juillet, le passeport sanitaire européen est officiellement en application dans l’Union européenne. Après l’inflation des mesures restrictives, “libres de circuler”, les voyageurs européens pourront présenter le « QR code » du certificat à la police aux frontières ou aux compagnies aériennes, en version papier ou électronique.
Nous vous conseillons la lecture d’une excellente tribune signée Alberto Alemanno, professeur de droit européen et “citizen lobbyiste” dans The Guardian : We lived the European dream. Will any politician stand up for open borders?
Épisode #3 • Le droit européen, au service des sécessionnistes de la Super League
par Nabil Lakhal
Pour notre troisième épisode sur le Football et le droit européen, nous allons évidemment revenir sur le scandale de la Super league européenne de football, cette compétition sportive fermée entre les douze meilleurs clubs européens de football. À l’image de la NBA au basketball, le 18 avril 2021, Florentino Pérez – président du Real de Madrid – annonce la création d’une Super Ligue de football permettant aux meilleurs clubs de s’affronter, rivalisant ainsi avec la Ligue des champions, autre compétition majeure de Football contrôlée par l’UEFA. Celle-ci a menacé les clubs impliqués, de sanctions pouvant aller jusqu’au bannissement de toutes les compétitions nationales, européennes et mondiales. Après l’échec du projet, l’UEFA avait tout de même sanctionné d’une retenue de 5% des revenus que l’UEFA allouait, les neufs clubs repentis.
Face à ces menaces de sanctions — et tout en considérant que l’UEFA entravait la concurrence potentielle du marché et limitait le choix du consommateur — un juge du tribunal de commerce de Madrid a saisi le juge européen le 13 mai dernier afin de déterminer si l’UEFA méconnaîtrait les règles européennes de la concurrence.
Cette affaire ressemble à l’arrêt l’International Skating Union (ISU) du Tribunal de l’Union, qui a été contestée en appel devant la Cour de Justice. Le Tribunal européen avait considéré que les sanctions imposées à des athlètes participant à des compétitions non reconnues par l’Union internationale de patinage (UIP), étaient contraires aux règles de concurrence.
En effet, le Tribunal avait constaté que l’UIP était dans une situation de conflit d’intérêts, en exerçant à la fois une fonction réglementaire d’autorisation des compétitions organisées par des tiers, et d’organisation de ses propres compétitions, comme c’est le cas de l’UEFA à travers la Ligue des champions. Dès lors, les sanctions émises aux joueurs participants à une compétition non autorisée par l’UIP, avaient pour objet de restreindre les possibilités de concurrence des compétitions de patinage, méconnaissant dès lors l’article 101 TFUE. Le parallèle est très clair, nous verrons le raisonnement qui sera adopté par la Cour de Justice en réponse au juge espagnol … le droit européen est décidément un allié du football.
ÉCO. • de la dette et des bonds
La Commission s'adressait aux marchés obligataires mardi dernier (29/06) pour la deuxième émission de 9 milliards d’euros obligations NGEU. Ces titres de dette sont destinés à financer le plan de relance européen de 750 milliards d'euros, et sont partis comme des petits pains.
Cet enthousiasme obligataire ne doit surtout pas donner de mauvaises idées aux cigales budgétaires, selon les fourmis du parti conservateur de l’hémicycle, le PPE. La semaine dernière, le groupe PPE au Parlement européen a fait circuler un document sur le retour aux règles fiscales ante-Covid— consulté par le FT.
Les députés du PPE redoutent la trop grande flexibilité de la Commission européenne dans l’application des règles et veulent confier la surveillance des déficits à une autorité indépendante. Avec ce document, le PPE jette un nouveau pavé dans la marre, après les déclarations tantôt frugales tantôt Club Med d’Armin Laschet, l’héritier d’Angela Merkel à la CDU.
Le Pacte de stabilité et de croissance (3% de déficit ; 60% de dette publique sur PIB) a été suspendu en mars 2020 par la Commission, pour cause de Covid-19 et d’explosion des déficits. Cette clause dérogatoire finira bien par expirer. Mais quand ? C’est tout la question.
Elle a été étendue jusqu’à la fin de l’année 2022 pour donner un peu d’air aux États membres et éviter de répéter les erreurs de 2008, où le retour précoce à la discipline budgétaire avait ralenti la reprise. S’opposent traditionnellement à ce sujet les frugaux et le Club Med.
COMMERCE INTERNATIONAL • accord avec la Chine • taxation des multinationales
L’accord global sur les investissements avec la Chine (CAI), en négociation depuis 2014, a été suspendu en mai 2021, après les sanctions imposées par l’UE à la Chine, à laquelle ont répliqué des sanctions visant des personnalités politiques et des think tanks, dont le Mercator Institute for China Studies (MERICS).
Ouïghours, rôle de l’Allemagne, level playing field, Guillaume Thibault et Pierre Pinhas ont reçu pour What’s up EU François Chimits, économiste et analyste au MERICS, spécialiste du développement économique de la Chine et de la politique commerciale européenne, pour creuser ces sujets et nous éclairer sur la relation entre l’Union européenne et la Chine.
Sur un autre sujet, la semaine dernière, à la suite de longues négociations à l’OCDE, 130 pays se sont mis d’accord pour mettre en place d’un seuil minimal global de 15% pour la taxation des multinationales. Si les aficionados de la coopération fiscale crient victoire, certains mettent en garde contre le risque que l’UE torpille l’accord — “embarrasing is quite an understatement” a déclaré Paolo Gentiloni à Politico.
En effet, les 27 ne sont pas d’accord sur la façon de transposer cet accord international en droit national, avec l’Irlande, la Hongrie et l’Estonie comme fers de lance anti-OCDE. Ces développements interviennent alors même que la Commission est en train de finaliser son propre plan de “taxe digitale”, qui sera dévoilé le 14 juillet, ciblant les géants du numérique et déplait toujours fortement à l’Oncle Sam.
THE BREXIT DIARIES • fin du début de la guerre des saucisses
Angela Merkel, était en visite au Royaume-Uni le 2 juillet pour rencontrer Boris Johnson, le temps de parler du Protocole nord-irlandais, de viandes congelées, de l’OTAN et du Covid.
Enfin, Londres et Bruxelles sont tombés d’accord sur l’extension pour trois mois de la période de grâce du Protocole nord-irlandais, qui devait expirer la semaine dernière. En l’absence d’une extension, des contrôles aux frontières plus stricts auraient commencé à s’appliquer entre la Grande-Bretagne et l’Irlande du Nord, comme le prévoit l’accord de retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne. Elle aurait laissé planer l’ombre d’une “sausage war”, en raison des contrôles sanitaires et phytosanitaires s’imposant aux viandes congelées … sujet très sensible outre-manche.
ÉVÈNEMENT • J-3 !
Le Mouvement européen France et Sciences Po Alumni organisent avec nous un colloque sur les ambitions numériques de l’Europe avec des participants comme Emmanuel Combe et Christiane Féral-Schuhl. Inscrivez-vous !
À mardi prochain !