What’s up EU vous propose une série d’entretiens avec les acteurs de la Présidence française du Conseil de l’Union européenne.
Nous nous entretenons avec Stéphanie Yon-Courtin, députée au Parlement européen (Renew), vice-présidente de la Commission des affaires économiques et monétaires (ECON).
Stéphanie Yon-Courtin est rapporteure pour la commission ECON sur le texte portant sur le règlement sur les marchés du numérique, également nommé Digital markets act (DMA).
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À quoi sert la présidence tournante du Conseil de l’UE, et quelle marge de manœuvre donne-t-elle concrètement ?
Donner à chacun des 27 États membres l’opportunité d’imprimer sa marque dans le processus décisionnel de l’Union européenne est l’une des raisons de la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne. D’ailleurs, toute présidence débute par un temps fort de la démocratie européenne : le Chef de l’État à la tête de l’institution vient présenter aux parlementaires européens ses priorités et sa feuille de route.
Pendant toute la durée de son mandat de six mois, l’État qui préside le Conseil de l’Union européenne assure une fonction logistique. C’est lui qui va planifier, organiser et présider toutes les réunions européennes qui impliquent des représentants ou des ministres. Mais son rôle est aussi éminemment politique puisqu’en ayant le pouvoir sur l’agenda européen, il a la capacité de faire avancer certains dossiers législatifs, et à en freiner d’autres. L’État qui préside le Conseil de l’Union européenne a donc une véritable influence au sein du processus décisionnel européen.
Quels sont, selon vous, les dossiers sur lesquels une présidence française peut faire la différence ?
Le 19 janvier dernier, Emmanuel Macron l’a rappelé lorsqu’il a présenté aux eurodéputés les objectifs politiques de la Présidence française du Conseil de l’Union européenne : notre continent doit reconquérir sa souveraineté s’il veut faire face aux défis actuels. Une souveraineté qui passe notamment par la transition écologique de notre continent, sa révolution numérique et la construction d’une Europe de la Défense.
Pour affirmer sa souveraineté, et parvenir à la construction d’une « Europe puissance » qui rayonne à travers le monde, l’Union européenne doit dépasser l’ancien modèle d’une Europe uniquement basée sur la coopération entre les États membres, et se donner les moyens de bâtir un nouveau modèle de croissance. Une croissance verte, numérique et inclusive.
Pour vous donner quelques exemples concrets, et conformément au cap que le Président a fixé, la création d’un « SMIC » européen, l’instauration d’une taxe carbone aux frontières de l’Europe, ou encore la régulation des marchés numériques figurent au rang des priorités de la PFUE. Mais ce ne sont pas les seules !
En tant que rapporteure du Digital Markets Act (DMA) — l’un des dossiers prioritaires de la PFUE —, et participant actuellement aux trilogues, je suis particulièrement bien placée pour affirmer que cette législation avance à grands pas. J’ai bon espoir que nous parvenions à un accord sur ce dossier d’ici la fin de la PFUE.
Quel est le rôle du Parlement européen dans le déroulement de cette PFUE ?
Le Parlement européen est un maillon indispensable dans l’élaboration des textes de loi européens. En tant qu’eurodéputés, nous avons un rôle de co-législateur avec le Conseil de l’Union européenne. Mais notre rôle est aussi politique. Pour que les textes soient adoptés, nous devons constituer des majorités. Nous avons aussi la capacité de pousser certains dossiers, tout comme nous pouvons interroger la Commission européenne et le Conseil des ministres, et les inciter à agir.
Enfin, Renew Europe, le groupe politique auquel j’appartiens, est la troisième force du Parlement européen. C’est une position stratégique, qui nous permet de peser vraiment dans les débats. Nous pouvons faire et défaire des majorités.
Le Président de la République entend faire de l’Europe un thème important de la campagne présidentielle. Dans cette perspective, quelle influence la PFUE a-t-elle sur le quotidien des Français ?
Dans la mesure où nous changeons les règles de l’Union européenne, cela aura forcément une incidence sur le quotidien des Français et dans nos territoires. Par exemple, la régulation des marchés numériques (DMA) — que la PFUE souhaite voir aboutir rapidement — ne consiste pas seulement à lutter contre les pratiques anticoncurrentielles des GAFAM.
Elle vise aussi à redonner du pouvoir aux utilisateurs, qui auront désormais la liberté de choisir. Elle va également créer des conditions favorables à l’émergence de champions numériques européens avec, à la clé, la création de nouveaux emplois. Il en va de même pour la transition écologique de notre continent, transition qui va changer en profondeur notre manière de nous déplacer ou de consommer.