Revue européenne | 22 juin 2021
Armin Laschet • mini-série sur le foot • démarrage des plans de relance • finance • AstraZeneca c. Commission • Biélorussie • Macron-Merkel • relations transatlantiques • The Brexit Diaries
Bonjour! Bienvenue dans la Revue européenne du mardi, un condensé d'actualité européenne utile. Pour fêter le retour des palpitations du monde pré-Covid, avec l'Euro 2021, What's up EU vous propose une mini-série sur le football, en exclusivité, jusqu'à la fin de l'Euro. Bonne lecture !
À LA UNE • Comment le candidat préféré des Allemands voit-t-il l'avenir de l'Europe ?
Le candidat de la CDU, Armin Laschet s'est exprimé dans les colonnes du Financial Times cette semaine. L’héritier de la chancelière, en tête des intentions de vote aux élections de septembre, s'inscrit dans la continuité d'Angela Merkel. Son opinion est déterminante pour l'avenir de l’Union.
On vous résume en cinq points le programme de Armin Laschet pour l'Europe :
un retour à l’orthodoxie budgétaire : respect des critères de Maastricht, actuellement suspendus en Europe, c’est-à-dire limiter l’endettement à 0,35% du PIB
temporaire, c'est l'adjectif qui devrait qualifier le fonds de relance post-Covid Next Generation EU
assouplir la prise de décision au niveau de l'UE en matière de politique étrangère et de sécurité commune : pour Laschet, il faut encore plus de majorité qualifiée (et moins d'unanimité)
achever le projet de pipeline Nord Stream 2
éviter la mentalité de “guerre froide” avec la Chine, “à la fois” rivale systémique et partenaire, sur le climat notamment.
Sur la Chine, l’Allemagne resterait sur une position bien plus modérée que ce que souhaitent les alliés américains, mais aussi les Verts allemands — bien plus intransigeants sur le sujet des droits de l’homme — et avec qui Laschet pourrait être amené à gouverner dans le cadre d’une coalition.
Épisode #1 : la création du mercato intérieur
Il y a bien un point de contact entre les passionnés de foot et les geeks du droit européen : 1995, l'arrêt Bosman, arrêt rendu par la Cour de justice dans un temps où le mercato connaissait des frontières bien réelles. Avec cette décision, le droit européen a révolutionné le football international et l'a fait entrer (rien que ça) dans l'ère moderne.
Footballeur professionnel belge, Jean-Marc Bosman jouait en Belgique, au FC Liège, mais voulait être transféré au club français de Dunkerque. Or, à cette époque, selon les règles des associations sportives, Liège pouvait complètement restreindre la possibilité d'un joueur d'être transféré : “clause de nationalité”, limitation du nombre de joueurs étrangers sur le terrain, possibilité de refuser de fournir au club acquéreur le certificat de transfert, en refusant tout départ de joueur sans indemnité et en demandant une compensation financière au club acquéreur.
Saisie par Bosman, la Cour de justice a mis fin à cette situation en considérant que la libre circulation des travailleurs implique "l'abolition de toute discrimination, fondée sur la nationalité, entre les travailleurs” et que les pratiques des clubs étaient donc contraires au droit de l’UE. Le principe de libre circulation des travailleurs ouvre alors la voie aux transferts internationaux de football.
ÉCO. • Les plans de relance démarrent
Ursula von der Leyen est en tournée pour les plans nationaux pour la reprise et la résilience. Après la Grèce, le Portugal, l’Espagne et le Luxembourg la semaine dernière, c’est au tour de l’Autriche d’obtenir le feu vert de la Commission ce lundi (21/06). Les 672,5 milliards d’euros de la Facilité pour la reprise et la résilience doivent être fléchés vers des objectifs précis, notamment en matière de transition écologique ou de numérique.
La semaine dernière, pour effectivement mettre en place le plan de relance, la Commission a blanchi huit banques épinglées dans le "cartel des traders", par un retournement de veste spectaculairement opportuniste. Un mois plus tôt, les banques avaient été condamnées et exclues de la procédure d'émission d'obligations de Next Generation EU par le gendarme européen de la concurrence sous la houlette de Margrethe Vestager. Finalement, elles pourront bien mener les futures syndications d'obligations dans le cadre du plan de relance.
Soit dit en passant, la question de la transparence dans le versement des fonds du plan de relance se pose plus que jamais. Le directeur général de l’Office européen de lutte anti-fraude (l'OLAF) s’en est inquiété la semaine dernière parce certains États membres refusent de participer à un système de reporting centralisé. Ce qui ouvre la porte à la fraude et la corruption.
Sur le plan budgétaire, pas question de freiner trop tôt les dépenses publiques : ça risquerait de coincer la reprise et de répéter les erreurs de la crise de 2008. Le Pacte de stabilité et de croissance — 3% de déficit public et de 60% de dette publique sur PIB — fera l’objet d’une clause dérogatoire jusqu’en 2022.
Le président du Comité budgétaire européen, Niels Thygesen, propose même d’aller plus loin et de conditionner la fin de la clause dérogatoire au retour du PIB à son niveau pré-Covid. Les frugaux n’entendent pas se laisser faire et préparent leur réponse pour l’automne, pour coïncider avec le résultat des élections en Allemagne. En opposition au "Club Med" des pays plus ouverts aux flexibilités budgétaires des traités, on voit apparaître un axe frugal, en faveur du retour de l'application stricte des règles budgétaires.
EURO • la BCE se réunit en “présentiel”
Les orientations futures de la politique monétaire européenne ont aussi suscité des discussions de haut niveau, en fin de semaine dernière. Les gouverneurs de la Banque centrale européenne se sont retrouvés "en présentiel" — et sans les cravates — à la campagne près de Francfort, pour préparer la première "revue stratégique" de la BCE depuis 2003. Une initiative ambitieuse de Christine Lagarde, qui doit être présentée à l’automne.
Trois grands sujets sont à l’agenda : verdissement de la politique monétaire, niveau cible d’inflation et euro digital.
COVID • AstraZeneca contre Commission
Devant la justice, c’est un match nul entre la Commission européenne et AstraZeneca. La Commission avait entamé une action devant le tribunal de première instance de Bruxelles pour obliger le laboratoire à accélérer la livraison de vaccins, sous peine d’une amende de plusieurs milliards d’euros.
Le tribunal, s’il reconnaît une “violation grave” du contrat entre le laboratoire et l'Union européenne, a refusé d'imposer un nouveau calendrier au groupe pharmaceutique.
DIPLO • Sanctions contre la Biélorussie • Macron et Merkel en tête à tête
Les ministres des affaires étrangères de l’UE ont approuvé lundi 21 juin des sanctions contre la Biélorussie pour le détournement du vol Athènes-Vilnius qui a conduit à l’arrestation de Roman Protassevitch, un opposant au président Loukachenko. Les sanctions visent 78 personnes et 8 entités liées au régime, avec interdiction de séjour et saisie des avoirs au sein de l’UE. Les États-Unis, le Canada et le Royaume-Uni ont également annoncé des sanctions.
À part ça, Emmanuel Macron et Angela Merkel se sont rencontrés à Berlin vendredi dernier pour un de leurs derniers dîners en tête à tête, en amont du prochain conseil européen des 24-25 juin. Les dirigeants ont fait savoir qu’il était nécessaire de trouver une “grammaire commune” (comme le dit le Président français) sur Ankara et Moscou.
TRANSAT' • sommet UE/USA • Airbus-Boeing • une "antitrust hipster" à la FTC
Le sommet UE/États-Unis s’est tenu mardi dernier à Bruxelles. Les paroles ont trouvé une traduction en actes : résoudre les différends commerciaux (aluminium, acier), coopération transatlantique sur les nouvelles technologies, une task-force pour accroître les capacités de fabrication de vaccins, travail sur le climat en amont de la COP26 et une pause dans la saga Airbus/Boeing.
Concernant cette bataille commerciale Airbus/Boeing, Européens et Américains se sont mis d’accord pour suspendre les tarifs douaniers pour 5 ans. Dans l'escalade, de nombreuses mesures punitives ont été prises, elles ont concerné tour-à-tour le vin et le fromage français ou encore les Harley Davidson ou même les poissons d’ornement.
Lina Khan est nommée à la tête du gendarme américain de la concurrence. C’est à une “antitrust hipster” : une critique du pouvoir de marché, des Big Tech et d'Amazon en particulier. 32 ans, juriste, professeur à Columbia, la nouvelle commissaire va inaugurer une phase beaucoup plus réformatrice du droit de la concurrence aux États-Unis. De quoi redonner aux États-Unis le leadership dans le “techlash” initié en Europe, notamment par la proposition de Digital Markets Act.
Mais, si l'administration Biden veut s’attaquer aux succès de la Silicon Valley, elle reproche quand même à l’UE de prendre pour cible des entreprises américaines. Les propos d'Andreas Schwab, rapporteur du Digital Markets Act au Parlement européen, pour qui le texte doit viser en priorité les plus grandes plateformes américaines, sont mal passés à Washington, qui s’en est plaint à la délégation de l’UE. Face aux protestations, Margrethe Vestager a tenu à préciser que le DMA "ne cible pas les géants américains du numérique" (FT).
THE BREXIT DIARIES • On avance !
Le Royaume-Uni a officiellement demandé à la Commission (17/06) une extension de la période de grâce du protocole nord-irlandais pour le cas précis des viandes surgelées. L'absence d’extension de la période de grâce au-delà de la date fatidique du 30 juin menaçait de déclencher une “guerre des saucisses” en raison des formalités douanières.
Un accord préliminaire a été trouvé sur la réserve d’ajustement pour surmonter les effets économiques du Brexit (17/06). Ce fonds, doté de 5 milliards d’euros, faisait l’objet de débats intenses concernant leur allocation, certains pays (comme la France) étant particulièrement fâchés de se retrouver contributeurs nets à la réserve. Il servira à compenser les pertes d'activités d’entreprises directement touchées par le Brexit, notamment dans le secteur de la pêche.
Et sinon, nous recevons ce soir Thomas Lambert, ancien directeur adjoint du cabinet du Secrétaire d’état aux Affaires européennes (2007 et 2009), associé-gérant chez Lazard au sein de l’équipe en conseil souverain, pour une discussion sur Next Generation EU, la dette commune, et l’avenir de l’euro.
À mardi prochain !