Bonjour et bienvenue dans cette newsletter. C’est un moment historique pour l’Europe et Thomas Harbor, notre spécialiste du Brexit, devait donc y consacrer une édition spéciale, dans un format long. Vous trouverez partout beaucoup d’informations sur le Brexit, alors nous proposons ici une sélection de quelques sujets, sans trop de jargon. Merry Brexmas !
THE ART OF THE DEAL — Pas de tarifs douaniers, le saumon écossais sera britannique et Sturgeon veut un nouveau référendum pour l’Écosse
Pas moins de dix mois de négociation ont été nécessaires pour que les négociateurs tombent d'accord sur les modalités de la coopération entre l'Union européenne et sa voisine d'outre-Manche. L’Accord de commerce et de coopération entre l'Union européenne et le Royaume-Uni ("l'Accord")entrera provisoirementen vigueur le 1er janvier 2021. La Chambre des communes est convoquée ce mercredi (30 déc.) pour un vote dont l’issue ne fait aucun doute : les travaillistes et les eurosceptiques de l’influent European Research Group (ERG) ont apporté leur soutien au Premier ministre. Le Parlement européen ne votera qu’en 2021. En effet, l’Accord qui doit être validé à l'unanimité du Conseil d’ici la fin de l’année, et sera ensuite discuté en session plénière au Parlement européen, vraisemblablement en février. Entre-temps, il s’appliquera provisoirement en attendant la signature de l’UE. Comme l’Accord ne touche qu’à ce qu'on appelle les compétences de l’Union (exclusives et partagées), la Commission européenne a proposé qu’il soit seulement ratifié par les eurodéputés — et non par les parlementaires nationaux des États membres.
L’Accord est en réalité triple. Il comporte (i) un accord de libre échange, portant sur la modique somme de 660 milliards de Livres Sterling d’échanges commerciaux, (ii) un accord de coopération policière et judiciaire, et (iii) un accord sur le règlement des différends qui peuvent survenir dans la relation future entre l'Union et le Royaume-Uni.
TOUT COMPRENDRE — 1259 pages, en six points.
No Tariffs — Il fallait que tout change pour que rien ne change : le Royaume-Uni et l’UE se sont entendus pour exclure les droits de douane et les quotas, bien loin des tarifs qui auraient été appliqués si la relation avait été réglementée par les critères de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Pas de barrières tarifaires donc.
En revanche, il y aura nécessairement des barrières non-tarifaires, puisque leur absence équivaudrait à une stricte équivalence des réglementations. En effet, à quoi bon sortir de l’Union si c’est pour conserver une pieuse observance des réglementations européennes ?
Ce traité de libre-échange ne garantit pas le même accès au marché européen qu’une adhésion à l'UE : la règle de l’origine s’applique, les contrôles douaniers sont rétablis, et les produits seront soumis à des réglementations différentes qu’ils devront respecter pour être autorisés à traverser la frontière. Lorsque le pays insulaire était un État membre, une réglementation européenne unique s’appliquait aux produits traversant la "frontière". Pour des secteurs comme l’automobile, l’agroalimentaire ou la chimie, le diable sera dans les détails des mesures non-tarifaires.
“L'Union et le Royaume-Uni constitueront désormais deux marchés distincts, deux espaces juridiques et réglementaires distincts. Cela créera, dans les deux sens, des obstacles inédits aux échanges de biens et services.” — Commission européenne, communiqué de presse du 24 décembre 2020
Pêche — C'est la Sardine qui a bouché le port de Marseille. Grain de sable des négociations cet automne, les quotas de pêche sont soumis à un régime de transition de cinq ans et demi. Les flottes européennes voient leurs quotas de pêche dans les eaux territoriales britanniques baisser de 25% d’ici 2026, date à laquelle les quotas seront soumis à négociation annuelle.
Actuellement, les bateaux britanniques pêchent 50 % des ressources halieutiques dans leurs eaux territoriales et ce chiffre devrait passer à environ 66 %. Pour rappel, la pêche européenne dans les eaux britanniques représente 637 millions d’euros par an. Vu les montants absolus (>0,1% du PIB) et les concessions faites sur ce dossier, il est difficile de croire que le Royaume-Uni était prêt à faire de la pêche un argument de no-deal.
Au-delà des galéjades sur la souveraineté maritime, le principe de réalité s’imposera dès la première négociation des quotas dont nous parlions plus haut (en 2026) : il s’agit d’une négociation bilatérale, la pêche est un secteur parmi d’autre, le RU exporte 80% de sa pêche vers l’UE. L’Écosse, qui souhaite un second référendum sur sa participation au Royaume-Uni, ne trouvera que peu de réconfort dans ce nouveau deal : les quotas européens représentent moins de 5% des quotas totaux de pêche dans les eaux “écossaises”.
Level playing field — Cette expression fait référence à un terrain de jeu parfaitement plat, qui ne favorise ni ne défavorise aucune équipe. Comme l'explique le journal britannique The Economist, elle est utilisée depuis le début des négociations sur le Brexit pour désigner un accord juste et équitable. Effectivement, il ne faudrait pas que l'Accord entre l'Union et le Royaume-Uni ne permette de dumping en matière de concurrence (notamment les aides d'État), de droit du travail, de législation environnementale, ou de fiscalité.
Les deux blocs ont donc mis en place un mécanisme de gouvernance inédit pour assurer un level playing field dans la durée. Il permet à la fois aux États et aux entreprises de contester les subventions et avantages réglementaires indus accordés par l’une des parties. Pour éviter la compétence de la CJUE, l’Accord créé un tribunal arbitral chargé des différends futurs. En fin de compte, un tel mécanisme permet de pallier les distorsions de concurrence et, par ricochet, de rééquilibrer les divergences réglementaires entre le Royaume-Uni et l’Union européenne.
On vous explique ce point en détail plus bas dans cette lettre ▼
Inter alia —C'en est fini de la libre circulation des personnes. C'est le grand retour des permis de travail et autres visa à points pour les travailleurs venant de l’UE, conformément au vœu des Britanniques de contrôler plus strictement leur politique migratoire. Cependant, aucun visa n’est nécessaire pour des voyages de moins de trois mois.
L'île britannique sort aussi du programme Erasmus, et les conséquences en seront importantes concernant les frais de scolarité — qui vont doubler — des étudiants européens au Royaume-Uni. Les qualifications professionnelles ne seront plus reconnues automatiquement par équivalence : ce sera désormais cas par cas et pays par pays.
Ce qu’il reste à négocier — Certains sujets ont été évités et devront faire l’objet de négociations ad hoc. La City fait figure de grande oubliée de l’Accord, qui ne traite pas des services financiers. A ce stade, il n’y a pas de mécanisme d’équivalence qui permet aux sociétés domiciliées au RU de vendre leurs services financiers au sein de l’UE. Des négociations au cas par cas auront lieu en 2021 entre le RU et l’UE sur ces décisions d’équivalence. Les flux de données entre l’UE et le RU sont également suspendus à une décision d’équivalence ultérieure, ce qui pose une importante question de protection des données après les derniers épisodes de la saga Schrems devant la CJUE.
BUDGET — Un contributeur net en moins.Le budget européen représente environ 1% du Revenu national brut (RNB) de l’UE. Le Royaume-Uni était un contributeur important du Cadre financier pluriannuel du bloc européen, malgré le rabais sur sa contribution négocié en 1984 par Margaret Thatcher. La sortie du RU de l’UE coïncide avec le vote du Cadre financier pluriannuel (CFP) pour la période 2021-2027, alors même que le CFP passe de 960 milliards d’euros pour 2014-2020 à 1 074 milliards d’euros pour 2021-2027.
Sur le plan budgétaire, l'UE a changé son fusil d'épaule avec la pandémie de Covid-19, même si parler d’un “moment hamiltonien” peut sembler prématuré. Le 21 juillet dernier, les européens sont parvenus à briser deux tabous budgétaires dans le cadre du plan de relance Next Generation Europe (NGEU), doté de 750 milliards d’euros. D’une part, 52% des fonds seront des subventions et non des prêts. D’autre part, la Commission européenne émettra jusqu’à 100 milliards d’euros d’obligations dans le cadre du programme SURE.
Dans un contexte fiscal détérioré par les effets de la pandémie, le Brexit n’est finalement qu’une charge supplémentaire à mettre d’une Union désormais ouverte aux transferts fiscaux et à l’emprunt.
Un peu d’histoire, et 3 points de focus : le mécanisme de gouvernance, le transfert des données outre-Manche et l’exclusion des services financiers
Résultat d’une grande inconstance à la tête du Royaume-Uni depuis le référendum de 2013, l’Accord a laissé des points en suspens (le monde de la finance, le transfert de données personnelles) et propose aussi des solutions originales, comme un mécanisme inédit de règlement des différends. Quoi qu’il en soit, ces négociations nous ont enseigné une chose : les dates butoirs sont souvent renvoyées aux calendes grecques.
LA SAGA BREXIT — de David Cameron et Theresa May à Boris Johnson, et de Michel Barnier à Michel Barnier.
Le 23 juin 2016, 52 % des citoyens britanniques votent “Leave” au référendum annoncé en 2013 par le Premier ministre David Cameron sous la pression des eurosceptiques du European Research Group (ERG) et devant la montée en puissance du United Kingdom Independance Party (UKIP) de Nigel Farage.
Compromis par son soutien au “Remain” et les trop faibles concessions obtenues auprès des Européens, Cameron quitte Downing Street et c’est Theresa May qui lui succède en juillet 2016. Entre juillet 2016 à mars 2017, si l’on sait que Brexit means Brexit, on s’interroge tout de même sur ce que cela veut dire avant de déclencher l’article 50 du TUE (mars 2017), coup d’envoi de la procédure de sortie. Une date butoir est fixée initialement à deux ans.
En novembre 2018, un premier accord de retrait est trouvé entre le Royaume-Uni et l’Union. Seul coince le backstop sur la frontière irlandaise. Ce backstop explique en grande partie les échecs parlementaires répétés de Theresa May devant les Communes entre janvier et mars 2019. En avril 2019, faute de majorité, les deux ans de négociation prévus sont dépassés, et une première extension est accordée jusqu'au 31 octobre 2019. Peu de temps après (mai 2019), Theresa May démissionne, prenant acte de l’impossibilité de réunir une majorité.
Elle est remplacée en juillet 2019 par Boris Johnson, ancien maire de Londres, qui entend se débarrasser du backstop irlandais. En octobre 2019, un nouvel accord est trouvé entre le Royaume-Uni et l’Union, mais pas à temps pour se passer d’une nouvelle extension, jusqu’au 31 janvier 2020 cette fois-ci. Entretemps, Boris Johnson renforce sa majorité aux Communes (décembre 2019) et la majorité conservatrice vote pour son accord de retrait en janvier 2020.
Le 1er février 2020. Le Royaume-Uni quitte l’Union, mais seulement sur le papier. L’accord de retrait prévoit un statu quo pendant une période de transition qui s’étend jusqu’au 31 décembre 2020. Les négociations démarrent en mars 2020, alors que la première vague de Covid-19 bat son plein. Le Royaume-Uni laisse passer la date butoir pour demander une nouvelle extension (1er juillet 2020), ce qui réduit définitivement les options à deal or no deal, et ce avant le 31 décembre 2020.
La pression monte en été alors que les dirigeants européens se mettent d’accord sur un plan de relance inédit de 750 milliards d’euros pour lutter contre les effets économiques de la pandémie de Covid-19 (17-21 juillet 2020) et pour mutualiser une partie de la dette émise dans ce cadre. L’été se passe sans avancées majeures dans les négociations.
En septembre, un accroc majeur intervient et menace de faire échec à tout progrès. Il s’agit de l’Internal market bill, présentée par Boris Johnson devant les Communes. Ce projet de loi propose de revenir sur le protocole nord-irlandais signé dans le cadre de l’accord de retrait signé avec l’UE. Il est demandé aux Communes de voter pour un texte violant un accord international, ce qui pousse la Commission européenne à lancer une procédure d’infraction à l’encontre du Royaume-Uni (10 octobre 2020).
Devant cette impasse, le 16 octobre 2020, le Premier ministre britannique décide de rompre les négociations, et appelle les Britanniques à se préparer au no-deal. Une semaine passe et les négociations reprennent entre MM. Frost et Barnier, et les britanniques acceptent de ne pas violer l’accord qu’ils ont signé (7 déc. 2020). Alors que les deadlines ont été repoussées au delà de ce qui était imaginable et qu’un compromis sur la pêche bloque toujours, une percée décisive arrive entre Boris Johnson et Ursula von der Leyen le 24 décembre 2020, à J-7.
Pour les amateurs de frises chronologiques complètes ► voir celles du C.E.R, et du Conseil européen.
LEVEL PLAYING FIELD — Éviter le dumping grâce à un “mécanisme horizontal” de gouvernance.
La concurrence entre les entreprises de l'Union et du Royaume-Uni se fera sur un pied d'égalité sans que l'une ou l'autre partie puisse jouer de son autonomie réglementaire pour accorder des subventions déloyales ou fausser la concurrence.
— Commission européenne, communiqué de presse du 24 décembre 2020
Le Royaume-Uni voulait absolument sortir du régime actuel de contrôle des aides accordés par les États aux entreprises (les “aides d'État”) chapeauté par la Commission, sous le contrôle de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE). C’est chose faite: il n’est plus question de droit européen, de DG COMP, d’article 107§1 du Traité sur le fonctionnement de l'Union (TFUE), et l’Accord évite soigneusement les termes trop connotés comme State aid, lui préférant l'appellation plus neutre de "subvention publique". Cependant, comme le notent des commentateurs avisés, la partie de l’Accord sur les aides d’État est considérablement plus étoffée que dans le cadre d'autres accords bilatéraux comme le CETA par exemple, à tel point qu’on pourrait l'analyser comme une “codification de l’acquis européen” en matière de contrôle des aides d’État.
Comme évoqué dans le troisième point (ci-dessus ▲), l’enjeu est d’assurer un level playing field entre le Royaume-Uni et l’Union, tant sur le plan de la réglementation que sur celui des aides d'État ou de la fiscalité. Pour des partenaires commerciaux aussi intégrés, il s’agit d’une question stratégique.Les deux parties s’engagent à respecter le level playing field “en maintenant des niveaux de protection élevées dans des domaines tels que la protection de l’environnement, la lutte contre le changement climatique et la tarification du carbone, les droits sociaux et du travail, la transparence fiscale et les aides d’État”. L’Accord permet ainsi de couvrir les aides d’État, quelle que soit leur forme (subventions ou traitements fiscaux particuliers) mais aussi les mesures réglementaires ou fiscales de nature à conférer un avantage spécifique à une partie.
Original et innovant, le mécanisme de règlement de différends a retenu notre attention : deux voies de droit sont ouvertes lorsqu’une mesure fausse la concurrence.
Les États peuvent adopter des mesures de rétorsion intersectorielles (des droits de douane) applicables aux domaines de l’Accord. Par exemple, si le Royaume-Uni accorde un traitement favorable et injustifié à ses pêcheurs, l’Union peut frapper les automobiles de droits de douane, mais pas les services financiers, qui, eux, ne figurent pas dans l’accord. En cas de conflit quant à la mesure de rétorsion elle-même, un mécanisme d’arbitrage est prévu devant un Conseil conjoint (indépendant) qui veillera à la correcte application et à l'interprétation de l’Accord.
Il va de soi que les entreprises ne peuvent elles-mêmes imposer des droits de douane. Elles pourront, en revanche, contester les mesures qui leur portent préjudice devant le juge ordinaire, compétent pour l’application de l’Accord.
Ce dispositif est inédit. Les accords de libre-échange vont rarement aussi loin en matière de contrôle des aides d’État et de la réglementation. Cela s’explique par le fait que le Royaume-Uni est un ancien État membre de l’Union, et non un simple « pays tiers ». L’Accord est un traité international, et le Conseil conjoint aura le pouvoir de régler les différends et d’en interpréter les dispositions. Si le Royaume-Uni n’est de fait plus soumis ni au droit européen ni à son interprétation par la CJUE, il n’est pas totalement libre de ses mouvements vis-à-vis de l’Union. L’Accord donne un “prix” à la divergence réglementaire, avec l’idée d’un balancier entre accès au marché unique et divergence réglementaire vis-à-vis de l’Union.
DONNÉES PERSONNELLES — On joue les prolongations (en attendant une décision d'adéquation)
Pourquoi faire maintenant ce qu'on peut reporter à demain ? C'est certainement la question que se sont posé les négociateurs quand ils ont envisagé d'ouvrir la boîte de Pandore des données personnelles. Résultat, l'Accord prévoit que la circulation des données à caractère personnel entre l'Union et les États de l'EEE/AELE et le Royaume-Uni peut librement continuer jusqu'à l'adoption de décisions d'adéquation, et pour une durée maximale de six mois.
Le règlement européen pour la protection des données personnelles (RGPD) restera donc applicable de manière transitoire au Royaume-Uni pour une durée supplémentaire maximale de 6 mois, c'est-à-dire jusqu'au 1er juin 2021. Jusqu'à cette date, les transferts de données personnelles vers le Royaume-Uni continuera de se faire dans le cadre actuel et ne sera pas considérée comme un transfert de données vers un pays tiers.
This means that organisations can be confident in the free flow of personal data from 1 January, without having to make any changes to their data protection practices.
— Elizabeth Denham, Information Commissioner (ICO.)
Après l'expiration de cette nouvelle période de transition, le Royaume-Uni deviendra un pays tiers au sens du RGPD et les flux de données personnelles de l'UE outre-Manche seront interdits de fait, à moins que les entreprises exportatrices de données européennes ne garantissent un niveau de protection des données équivalent à celui qui est garanti par le droit de l'Union. Pour les entreprises, mettre en place ce que le jargon RGPD nomme les "garanties appropriées" (qui sont en fait des mécanismes de transferts alternatifs), comprend (i) la conclusion des clauses contractuelles types, (ii) les règles contraignantes d'entreprises ou (iii) le recours à l'une des dérogations prévues par le règlement.
Pour éviter ces complications, mais sans pour autant l'inclure matériellement dans l'Accord lui-même (ce serait trop simple), l'Union et le Royaume-Uni ont envisagé d'accorder au Royaume-Uni une décision de la Commission européenne autorisant, de façon générale, les transferts de données personnelles vers le Royaume-Uni dite “décision d’adéquation”. Cela permettrait de poursuivre le libre transfert de données personnelles de l'UE vers le Royaume-Uni sans exiger des organisations exportatrices ou importatrices qu'elles prennent les “garanties appropriées” évoquées plus haut.
Il ne nous a pas échappé que l'autorité britannique de protection des données (la ICO), a invité les entreprises concernées à prendre la précaution de mettre en place ces fameuses garanties dans une déclaration du 28 décembre. Comme si la décision d'adéquation à venir devait être tardive (postérieure au 1er juin 2021) ou … bientôt annulée par la Cour de justice de l'Union européenne. Difficile de ne pas penser à l'arrêt Schrems II de juillet dernier, à l'occasion duquel la Cour de Luxembourg a défrayé la chronique en annulant, pour la deuxième fois, la décision d'adéquation déterminant les transferts entre l'UE et les États-Unis, plongeant tout le monde dans l'incertitude.
SERVICES FINANCIERS — La City, la belle oubliée
Comme attendu, l’accord ne couvre pas les services financiers. L’accès des prestataires de services financiers au marché unique doit être décidé ultérieurement soit dans le cadre d’une procédure par laquelle l’Union accorderait unilatéralement l’équivalence (et vice-versa), soit en laissant les États membres poser leur conditions aux prestataires de services britanniques.
Les services financiers sont dès lors exclus des secteurs qu’il sera possible de viser par des droits de douane unilatéraux en cas de déviation réglementaire ou d’aide d’État indue, ce dont le Royaume-Uni s’est félicité, mais qui n’est pas du tout l’enjeu stratégique, qui demeure l’équivalence et l’accès au marché européen pour la City.
Dans le Sunday Telegraph, Boris Johnson a admis que les dispositions sur les services n’allaient pas aussi loin que ce qu’il espérait. La Commission, dans une foire aux questions, précise que ses analyses doivent continuer sur le niveau de divergence réglementaire. En effet, les deux parties ont accepté que les décisions concernant l’accès réciproque au marché seraient fondées sur des déclarations unilatérales d’équivalence.
Les décisions d’équivalence unilatérales sont révocables, et par nature relativement précaires. Le Royaume-Uni entendait inclure des dispositions dans l’Accord pour obtenir des consultations avant un retrait de l’équivalence, ce qui a été refusé par l’UE.
Londres a accordé des équivalences à l’UE dans un nombre de domaines en novembre, mais Bruxelles n’a pris des décisions d’équivalence similaire que pour certains sujets centraux à la stabilité financière, comme l’accès des banques européennes aux chambres de compensation basées au Royaume-Uni.
Début 2021, le Royaume-Uni et l’UE devraient s'entendre sur leur future coopération en matière de services financiers, avec un accord (éventuellement) prévu pour mars.
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